Bon d’accord, cet événement n’est pas si nouveau, puisque nous nous y rendons depuis plus de 25 ans. D’abord sous le nom de SECA (Salon Européen des Centres d’Appels) puis sous le nom de Stratégie Clients, qui a fusionné avec celui du E-marketing pour donner naissance à cette première édition du All4Customer.
Si en 2023, il fallait être naïf pour penser que l’Intelligence Artificielle (IA) n’aurait pas de répercussions sur la relation client, en 2024, il faut être exilé sur une ile déserte depuis plusieurs mois pour ne pas se rendre compte que l’IA est définitivement devenue une actrice incontournable de l’expérience et de la relation client ! Et c’est parce que l’IA était partout dans ce salon que j’ai décidé de vous parler ici surtout des éléments plus stratégiques et humains. Oui, je sais, je peux parfois avoir le sens de la contradiction…
Redonner l’envie de traiter la relation client !
C’est l’AFRC (Association Française pour la Relation client, équivalent de notre Callnet.ch) qui a « ouvert le bal » des conférences plénières sur le thème de « Redonner l’envie : l’ambition 2024 des pros de la relation client ». Objectif qui peut sembler ambitieux et qui a été très bien traité par les responsables de La Poste, de France Travail (ex Pole Emploi) et de Domusvi, un des leaders de la prise en charge des personnes âgées ou à handicap.
L’organisation qui m’a le plus interpellé est la Poste, où ce sont des dizaines de milliers de collaborateurs qu’il a fallu mobiliser autour du projet « boucle courte ». Car même si le taux de réclamations n’est que de 0,06%, cela représente tout de même des millions de cas par an.
Les 3 engagements de cette opération sont les suivants:
- Le client peut réclamer n’importe où (sous-entendu qu’on ne le « balade » plus de service en service et de canal en canal),
- Délai de réponse de 48 heures,
- La qualité de la réponse: c’est le collaborateur du centre de colis le plus proche géographiquement du client qui l’appelle directement, que ce soit pour une bonne ou une mauvaise nouvelle
Pour responsabiliser les postiers, il faut animer en permanence et tenir des KPI (indicateurs clés de performance) clairs et connus de tous.
La prochaine étape de boucle courte sera d’utiliser de l’IA générative pour accélérer les process et donner de l’autonomie au client.
Chez Domusvi, je retiendrai le principe du « bas-haut-bas », qui veut que le terrain remonte les problématiques, qui sont ensuite traitées par le siège, qui doit donner des solutions aux équipes.
Pour résumer ces différentes initiatives, la responsable de France Travail trouvera la bonne formule du « c’est celui qui sait qui fait ».
Un benchmark multicanal sur les plaintes et les réclamations
En tant que rare membre non français de l’AMARC (Association du Management de la Réclamation Client), nous étions évidemment ravis du thème choisi cette année par la fameuse organisation au slogan inégalable « transformer le pépin en pépite ».
Et pour tout vous dire, nous nous sommes presque crus en Suisse avec le témoignage de l’ACL (Automobile Club du Luxembourg). Nous avons effectivement vu énormément de points communs avec notre fameux TCS : des membres qui le sont par tradition familiale, un fort attachement à la marque et un contexte multiculturel très marqué (les agents de l’ACL parlent 5 langues entre le français, l’anglais, l’allemand, le portugais et…le luxembourgeois).
Avec un joli score de satisfaction de 91%, l’ACL a surtout réussi à faire tomber le taux de réclamants qui les quittaient de 40% à 8%.
Une des « recettes » est de bien comprendre les différentes manières de fonctionner des membres , et notamment selon leurs nationalités:
- Les allemands font confiance au processus, et ne les contactent pas pour savoir où le dossier en est,
- Les anglais et néerlandais émettent peu de réclamations. Quand il y en a, c’est du sérieux,
- Les latins amènent plus de défis car ils sont plus insistants, veulent plus de détails, et souhaitent plus de dédommagements. Le positif : ils permettent de bien tester les processus !
- Enfin, les luxembourgeois ont beaucoup d’attente, car des arguments comme « mes parents étaient membres » ou « toute ma famille est membre » sont très souvent utilisés. Ils veulent des explications très précises.
Orange, présent dans 26 pays, nous a expliqué que la révolution digitale avait eu un impact très fort sur la réclamation, car le pouvoir s’était équilibré entre clients et entreprises, par l’utilisation des réseaux sociaux.
Reprenant quelques notions du fameux « Best service is no service », le responsable de l’opérateur expliquait qu’il fallait tout simplement donner moins de raisons de réclamer.
La différence amenée entre réclamation « chaude » et réclamation « froide » était très intéressante, le responsable du géant français des télécoms conseillant d’utiliser des KPI et des process différenciés selon les cas.
Par ailleurs, si la prise en charge de la réclamation doit être rapide (maximum de 72 heures), la résolution peut parfois prendre plus de temps. Il peut même être parfois très frustrant pour un client de voir le problème qu’il trainait depuis des semaines être résolu en 10 minutes à la suite de son appel (« ils auraient donc pu le faire rapidement bien avant… »).
Expérience collaborateur : comment construire des parcours qui favorisent l’engagement et le bien-être des équipes ?
Vous comprendrez aisément qu’avec un titre de conférence pareil, je me sois inscrit au salon voisin à All4Customer, en l’occurrence le « Workspace ».
La table ronde organisée par l’IDET (Association des Directeurs de l’Environnement de Travail) a permis aux responsables de Shiseido (cosmétiques), LVMH (Luxe) et Ipsen (Médical) de partager leurs meilleures pratiques en termes d’expérience collaborateur.
J’ai été assez bluffé par la pyramide de Maslow adaptée à l’environnement de travail, et vous retranscris ici ce que j’en ai retenu :
- Physiologiques: air neuf dans les bâtiments,
- Sécurité: accessibilité au site (transports), propreté, équipement fonctionnel,
- Sociaux: nouveaux espaces de travail, besoins d’échanges,
- Valorisation: personnalisation, être reconnu par les hôtesses à l’accueil, avoir son ordinateur et ses cartes de visite sur son bureau quand on commence,
- Réalisation de soi: dépend de toutes les autres strates.
Les réponses à la question de la mesure de l’impact des mesures de « bien-être » m’ont également beaucoup intéressées.
Ipsen fait des questionnaires avec beaucoup de verbatims (commentaires), en précisant que le plus important est de revenir vers les collaborateurs avec les résultats et les actions mises en place suite aux enquêtes. Dès l’onboarding (premiers jours dans l’entreprise), les services proposés au collaborateur sont présentés et on les incite à faire des retours détaillés dans le but de s’améliorer.
Shiseido pense aussi qu’il faut tenir au courant le collaborateur par rapport à la demande qu’il a faite. Son responsable pense toutefois qu’il faut avoir du recul par rapport aux demandes faites dans les enquêtes. Ainsi, à la suite d’une forte demande identifiée dans les questionnaires, une offre de légumes vapeur a été introduite à la cantine… mais personne ne les mange.
LVMH pense que c’est la limite des questionnaires. Les plaignants sont surreprésentés. Rien de mieux que d’être au courant au fil de l’eau. Chez eux, il y a donc des gouvernants qui prennent la température dans les bureaux, prennent en charge des demandes d’intervention, etc.
Au final, le résultat d’un sondage vient souligner l’importance de se sentir bien pour bien travailler : il y a 41% d’absentéisme en moins quand les gens se sentent bien au travail !
Et l’IA dans tout ça ?
Bon d’accord, je sens que certains vont être frustrés à la lecture de cet article très partisan où l’humain a été clairement placé au centre, en ne citant que très rarement des mots comme bots ou IA…
Alors pour nous rattraper, peut-être faudrait-il noter dans votre agenda la date du prochain Relacs Contact Day, qui aura lieu le jeudi 28 novembre.
Et, qui sait, peut-être que Relation Client et IA seront mis en avant ?
Ce que veulent les Suisses en matière de services clients
Canaux de contact, motifs, délais de réponses… voici l’étude altamedia qui fait le point sur les attentes des suisses en matière de services clients.
Spécialiste de la relation client depuis 2003, nous avons exploré les attentes et les préférences des Suisses en matière de services clients dans divers secteurs d’activité lors d’une étude récemment menée auprès de 1025 personnes résidant en Suisse.
Les résultats obtenus offrent un aperçu précieux sur l’importance cruciale d’un service clients de qualité dans la vie quotidienne des consommateurs suisses, et mettent en lumière les aspects clés qui influencent leur perception des entreprises et leurs décisions d’achat.
74% ont contacté un service clients au cours des 12 derniers mois
L’étude révèle que près de trois quarts des participants ont eu un contact avec un service clients au cours de l’année écoulée. Cette statistique reflète l’omniprésence des interactions avec les services clients dans la vie quotidienne des suisses, soulignant ainsi l’importance cruciale de ces interactions pour les entreprises.
La téléphonie, le secteur le plus sollicité
Parmi les entreprises contactées, celles opérant dans les secteurs de la téléphonie (46%), de l’assurance maladie (29%), de la banque (27%), de l’assurance chose (21%), et du e-commerce (19%) sont les plus sollicitées.
Ces secteurs clés sont ceux où les attentes en matière de service clients sont les plus élevées, car ils jouent un rôle important dans la vie quotidienne des Suisses.
Les motifs de contact
Cette étude démontre que les services clients sont bien sollicités tout au long du parcours client, que ce soit en amont pour avoir des informations (22%), pendant pour acheter un produit ou un service (29%) ou suivre sa commande (18%), et surtout en aval pour avoir un SAV (45%) ou résilier un service (16%).
Ces différents motifs illustrent la diversité des besoins des clients et soulignent l’importance pour les entreprises de fournir une assistance complète et efficace pour répondre à cette variété de types de contacts
Les canaux de contacts préférés
L’étude examine également les canaux de contact préférés des Suisses pour joindre un service clients.
Sans surprise, le téléphone reste le canal de communication le plus populaire, utilisé par 74 % des répondants. Il est suivi par l’e-mail et les formulaires en ligne (54 %). Le contact en face à face dans les points de vente est également une option appréciée, bien que moins fréquemment utilisée (24%). Le chat (live chat et chatbot) a également gagné en popularité, arrivant en quatrième position avec 20 % utilisateurs, ce qui marque une belle ascension par rapport à 2016 (3,5%).
Ces préférences en matière de contacts, et le fait que les répondant ont sélectionné en moyenne 1,6 canaux, mettent en évidence la nécessité pour les entreprises d’adopter une approche omnicanale pour répondre aux besoins diversifiés de leur clientèle.
Les irritants par téléphone
Canal le plus utilisé par les Suisses, le téléphone peut pourtant irriter les appelants sur plusieurs points. Largement en tête (71%), on trouve le temps d’attente trop long suivi par la nécessité de parler à plusieurs interlocuteurs (41%). Suivent la multitude de choix des serveurs vocaux (tapez 1 pour le français, tapez 2…), ainsi que l’incompétence des agents du service clients (27%).
Viennent clôturer la liste le manque de maîtrise de la langue (23%), la musique d’attente non adaptée (20%) et l’accent marqué du conseiller (11%).
Ces points soulignent l’importance pour les entreprises d’optimiser leurs processus pour offrir une expérience fluide et efficace à leurs clients.
Les délais de réponse attendus
Quel est le délai acceptable entre le moment où l’on compose le numéro et où l’on est mis en relation avec un agent ? Voici une question qui nous est souvent posée lorsque nous auditons les entreprises.
L’étude révèle que pour les appels téléphoniques, ils attendent une réponse en moins de 2 minutes.
Pour les e-mails, le délai attendu se situe entre 12 et 24 heures, tandis que sur les réseaux sociaux, les attentes sont encore plus élevées avec un délai de réponse attendu inférieur à 1 heure.
Ces délais de plus en plus courts montrent l’importance de la réactivité et de l’efficacité dans les interactions avec les clients pour garantir leur satisfaction et leur fidélité à long terme.
L’influence de la qualité du service clients sur le client
Il est par ailleurs intéressant de noter que 95 % des participants à l’étude ont déclaré que, en cas d’expérience positive avec un service clients, ils étaient plus enclins à être fidèles à l’entreprise. 93 % ont souligné que la qualité du service clients influence grandement l’image qu’ils ont d’une entreprise, pendant que 89 % ont affirmé que la qualité du service client influence leur décision d’achat ou de réachat.
En conclusion, cette étude souligne l’importance du service clients tant dans l’acquisition, la fidélisation de la clientèle et la réputation des entreprises.
En prenant en compte ces résultats, les entreprises opérant en Suisse sont encouragées à ajuster leurs pratiques pour répondre aux attentes spécifiques de leurs clients, en garantissant des réponses rapides et efficaces sur les canaux de communication privilégiés par leur clientèle.
Retrouver l’ensemble de l’enquête en regardant le replay de notre webinaire :
L’empathie est-elle toujours indispensable pour nos services clients ?
L’empathie est un concept qui est régulièrement cité lorsque l’on parle de service clients ou de relation client.
Mais de quoi s’agit-il au juste ?
Y a-t-il des limites à l’utilisation de l’empathie ?
Et après tout, faut-il vraiment faire preuve d’empathie ?
Qu’est-ce que l’empathie ?
En psychologie, l’empathie se définit comme la capacité d’une personne à écouter de manière active une autre personne, de comprendre ses émotions et ses ressentis en « se mettant à sa place ».
Selon Serge Tisseron (psychiatre, psychanalyste, docteur en psychologie et membre de l’Académie des technologies), on distingue trois types d’empathie : l’empathie affective (ou émotionnelle), l’empathie cognitive et l’empathie mature.
- L’empathie affective : (ou émotionnelle) permet à un individu d’identifier les émotions de la personne qu’elle écoute.
- L’empathie cognitive : permet à un individu de comprendre l’état psychique de l’autre sans lui porter de jugement. Par exemple « je comprends que tu sois heureuse, et je comprends pourquoi » mais ne ressent pas la même chose que l’autre. L’individu garde une distance face à l’émotion.
- L’empathie mature : c’est le combiné des deux, c’est identifier les émotions, les comprendre et les ressentir.
Selon Jacques Lecomte, docteur en psychologie et président de l’Association française et francophone de psychologie positive, il existerait un quatrième type d’empathie, l’empathie comportementale qui consiste à mimer inconsciemment les faits et gestes de notre interlocuteur (croisement de bras, intonation de voix, vocabulaire…). D’après Jacques Lecomte, l’empathie comportementale serait corrélée à l’empathie émotionnelle.
Développer l’empathie au sein de vos équipes du service clients
Instaurer l’empathie au sein de ses équipes demande de l’engagement et une stratégie bien précise. Pour fonctionner correctement, il faudrait même qu’elle fasse partie intégrante de la culture de l’entreprise.
Voici quelques éléments que vous pouvez mettre rapidement en place au sein de vos équipes.
- Pratiquez l’écoute active ! C’est à travers l’écoute active que vos clients pourront ressentir votre empathie. Au travers de cette technique, vous pourrez identifier les émotions de vos clients et cibler votre discours. Cela permettra à vos clients de s’engager davantage dans les échanges et d’apporter un maximum d’éléments permettant à vos équipes de trouver des solutions rapides et efficaces à la résolution de leurs problématiques.
- Personnalisez vos échanges ! Le fait de rendre unique chaque client renforcera vos interactions avec ce dernier. C’est ici que la relation de confiance peut se développer.
- Adaptez votre langage à vos clients ! Utilisez le même registre de langage que votre client, cela lui permettra de se sentir compris, et il comprendra aisément ce que vous lui direz en retour.
- Prenez le temps de terminer vos échanges ! Rien de pire que de ressentir à l’autre bout du fil que l’agent du service clients veut en terminer rapidement. Soigner la fin de vos interactions est primordial pour terminer sur une bonne note !
Les limites de l’empathie
Bien que l’empathie présente de nombreux avantages, il est primordial de bien poser le cadre de son utilisation pour « protéger vos équipes ». Bien sûr, à force de vouloir bien faire en acceptant toutes les émotions d’autrui, il est fort probable de ressentir une grande frustration et c’est ce que distingue Jacques Hochmann par deux notions différentes : l’empathie humide et l’empathie sèche.
L’empathie sèche permet d’écouter et comprendre l’autre sans être affecté personnellement, contrairement à l’empathie humide où l’interlocuteur écoute, comprend et ressent la même chose que la personne qu’il écoute. Il est aspiré par les émotions négatives de son interlocuteur.
De ce fait, il est essentiel pour vos équipes de ne pas se laisser imprégner des émotions de vos clients. Il est donc nécessaire de former vos équipes sur le cadrage à avoir et les barrières psychologiques à mettre en place.
Une autre théorie serait avancée par Paul Bloom, qui enseigne la psychologie à l’Université Yale, selon laquelle l’empathie serait un sentiment nuisible car elle empêcherait de prendre des décisions rationnelles (Against Empathy: The Case for Rational Compassion). Selon lui, ce sentiment s’attarderait sur la souffrance d’une personne en particulier, nous laissant ainsi indifférent à la souffrance des autres.
Enfin, de manière très pragmatique, une surutilisation du « je comprends » dans un échange peut rapidement fatiguer le client, qui veut parfois simplement obtenir une information basique.
Et attention à l’effet boomerang, comme cette chargée de clientèle qui à force d’utiliser du « je comprends » s’est entendu dire « Vous avez une fille de 8 ans qui a une leucémie ? Non ? Alors arrêtez de dire que vous me comprenez ! ».
L’empathie oui, avec sincérité et discernement…
Faire preuve d’empathie, c’est mettre en valeur vos interactions et soigner votre service clients. En d’autres termes, c’est votre valeur ajoutée !
Il est toutefois important de bien former ses équipes sur le sujet, pour éviter de tomber dans ses dérives !
Et notamment probablement la pire de toutes : confondre empathie et sympathie, car si l’on peut tout faire pour sembler sympathique au client qui nous contacte, l’objectif n’est pas de « souffrir avec l’autre ».